དྲན་པ།

Mémoire, attention, présence

D’après l’Abhidharmasamuccaya མངོན་པ་ཀུན་བཏུས། d’Asaṅga ཐོགས་མེད།, la mémoire constitue l’un des cinq facteurs mentaux à objets déterminés ཡུལ་ངེས་ལྔ།:

Vis-à-vis de phénomènes familiers, elle consiste en l’absence d’oubli du mental. Sa fonction est d’empêcher la distraction རྣམ་པར་གཡེང་བ།.

Elle est également le remède à la mémoire perturbatrice བརྗེད་ངེས།. Plus précisément, elle compte aussi parmi les huit attentions remèdes གཉེན་པོ་འདུ་བྱེད་བརྒྱད། qui permettent de réaliser le calme mental ཞི་གནས།.

Dans Le Calme mental, Dagpo Rinpoche la décrit ainsi :

« Une bonne concentration doit posséder deux qualités : d’une part la stabilité et d’autre part la clarté, accompagnée d’intensité. Pour être valable, la stabilité doit durer, et pour cela, il est nécessaire de recourir à différents instruments.

Nous avons besoin d’un moyen pour rejeter la distraction, afin que l’esprit ne soit attiré par aucun objet hormis celui de notre choix – tel est le rôle de la mémoire. En parallèle, il nous faut recourir à un second outil qui permet de surveiller si la concentration se maintient de manière correcte ou non – c’est la fonction de l'introspection ཤེས་བཞིན།.

De ces deux instruments indispensables, la mémoire est fondamentale. C’est à elle en effet que nous avons continuellement recours lorsque nous épanouissons notre concentration, puisque nos facultés doivent être dirigées vers un seul et même objet. La mémoire a pour rôle de garder présent à notre esprit cet objet, à l’exclusion de tout autre dont l’apparition détruirait notre concentration. Il s’agit d’une qualité de l’esprit qui, comme toutes les autres, peut être développée à l’infini. […]

Les textes comparent l’objet de méditation à un pieu, la mémoire à une attache, et notre esprit à un éléphant sauvage. Le travail consiste à lier l’éléphant au pieu. […] L’esprit livré à lui-même ne demeure pas concentré à l’objet, il faut donc une attache qui le contraigne à rester dirigé vers lui. Ce lien est la mémoire. Parfois un éléphant se montre très agité et tente de se dégager pour s’éloigner du pilier. C’est alors que selon la coutume indienne, on utilise un crochet. Ici, le crochet qui assagit notre esprit est l'introspection. C’est grâce à elle que nous pouvons vérifier si notre esprit est correctement orienté vers son objet. […]

Puisqu’ainsi l’entraînement à la concentration utilise principalement la mémoire, il est nécessaire de connaître avec précision sa nature. […] Selon l’enseignement du Buddha, le non-oubli d’un objet n’est en aucun cas l’effort de mémoire pour s’en rappeler. Il exige en réalité d’avoir l’objet clairement présent à l’esprit ; et aussi longtemps qu’il le reste, il n’est pas oublié. […]

Le terme tibétain gom སྒོམ།, habituellement traduit par méditation, signifie littéralement cultiver : il comporte l’idée de familiariser l’esprit avec son objet. Ainsi méditer signifie s’habituer à un objet de sorte à ne pas l’oublier. Vous voyez mieux dès lors le caractère essentiel de la mémoire. […]

Par conséquent, parmi les instructions concernant la concentration, la directive fondamentale consiste à indiquer la manière de l’utiliser. »